Situation financière de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales : Bilan et perspectives

Publié le Mis à jour le 15/10/2024 | Temps de lecture : 3 minutes

Yannick Le Guillou, Vincent Ruol (Igas), Laurent Trupin (Igf), Bastien Sayen (Iga)


Conformément à l’engagement de la Première ministre en 2023, une mission inter-inspections composée des inspections générales de l’administration, des affaires sociales et des finances a été désignée pour examiner la situation financière de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), régime de retraite intégré des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, qui concerne 3,7 millions de personnes (cotisants et retraités). 

En effet, fin 2023, les ratios financiers du régime sont très dégradés. Le résultat est déficitaire de 2,5 Md€, les capitaux propres sont très largement négatifs (-4,9 Mds€) et le besoin de trésorerie journalier dépasse certains jours les 10 Md€. À horizon 2030, le déficit annuel est estimé à plus de 10 Mds€ à droits constants. 

Plusieurs raisons expliquent cette situation : 

Des raisons inhérentes au régime :

  • La dégradation de son ratio démographique : de 4,53 cotisants pour un pensionné au début des années 80, il est descendu de manière continue jusqu’à atteindre 1,46 en 2022.
  • Ses caractéristiques propres : la population affiliée à la CNRACL a une espérance de vie à la retraite supérieure à la moyenne et bénéficie de départs anticipés dans une proportion importante.

Des causes qui lui sont exogènes :

  • La diminution progressive de sa base cotisante en raison de la croissance de l’emploi contractuel, qui cotisent au régime général pour leur régime de base et à l’IRCANTEC pour leur régime complémentaire. 
  • Les méthodes de calcul de la compensation démographique, qui excluent des règles de calcul les retraités avant 65 ans et ne tiennent pas compte des durées d’affiliation. 

Une source de financement trop peu diversifiée : 

  • Des prestations légales qui sont quasi exclusivement financées par des cotisations (97 %). 

Les pistes de redressement : 

Outre le renforcement de la gouvernance du régime, la mission propose un schéma d’harmonisation des ressources entre la CNRACL et les autres régimes :

  • Individualisation des cotisations par risque (retraite de base, retraite complémentaire, invalidité) pour favoriser la transparence et l’application de mesures spécifiques ;
  • Alignement des ressources externes sur celles des autres régimes (compensation des avantages non contributifs accordés au titre de la politique familiale notamment) ;
  • Compensation du manque de cotisations issu du recours à des agents contractuels par l’instauration d’un prélèvement au bénéfice de la CNRACL sur les salaires versés aux agents contractuels ;
  • Révision, sous l’égide du Comité d’orientation des retraites (COR), du mode de calcul de la compensation démographique.

Enfin, pour maximiser l’effet de ces mesures, la mission estime important de repartir d’une situation assainie. Ainsi, en l’état des prévisions et sans action correctrice, le taux de cotisation employeur (aujourd’hui de 31,65 %) devrait passer à 50,34 % en 2030 pour assurer l’équilibre du régime. L’effet des mesures chiffrables ci-dessus (sans assainir la situation à fin 2024) ferait passer ce chiffre à 45,13 %. Avec apurement du passif fin 2024 ce chiffre serait divisé par deux et aurait vocation à se réduire encore en fonction de l’évolution de la masse salariale.